Vers la crise du régime ?
En fait de « ré-enchantement du rêve franà§ais », Franà§ois Hollande nous mène benoîtement vers le chaos. Il est certain que s’il persiste dans son projet d’imposer « le mariage pour tous », l’opposition va se durcir et se politiser. « Quand les peuples cessent d’estimer, ils cessent d’obéir. » (Rivarol)
Alors que la crise économique et financière perdure voire s’accentue avec l’augmentation continue du nombre de chômeurs, le Gouvernement de François Hollande voit chaque jour croître le nombre des opposants actifs et déterminés à son projet idéologique de dénaturation du mariage. Le 24 mars a eu lieu ce qui est sans doute la plus grande manifestation populaire de l’histoire de France. La démission puis les aveux de Jérôme Cahuzac ont achevé de discréditer un gouvernement incapable d’échapper à l’alternative suivante : ou bien il ne connaissait pas les fraudes fiscales de son ministre du budget et il s’avère incompétent, ou bien il les connaissait et alors il était complice.
Hollande perd ses soutiens
Le président François Hollande, élu avec 48 % des voix des suffrages exprimés et 39 % des inscrits, voit peu à peu, mais inexorablement, se retourner contre lui les communautés ou corps sociaux qui avaient assuré son élection.
Les élus d’Outre-Mer, comme l’a manifesté l’intervention exceptionnelle du député martiniquais Nestor Azerot à l’Assemblée Nationale, sont vent debout contre le pseudo mariage homosexuel, au nom du respect de leurs coutumes et de la loi naturelle.
Les musulmans de France, qui avaient voté à 93 % pour François Hollande, ont été peu présents dans les manifestations mais l’UOIF (Union des Organisations Islamiques de France), liée aux Frères musulmans, a accueilli lors de son congrès, le 30 mars, Frigide Barjot qui, assez crânement, s’est présentée en jean et sans voile sur la tête.
Ce qui reste de démocratie-chrétienne plus ou moins gauchisante, dont le maître à penser fut Jacques Delors, le père de Martine Aubry, est aussi entré en dissidence par un éditorial retentissant contre les projets de dénaturation du mariage, signé de Jeanne Emmanuelle Hutin dans Ouest-France. La Bretagne qui, grâce à l’action conjuguée de Ouest-France et du clergé, était devenue une terre de gauche (la Région est à gauche, de même que les principales villes : Nantes, Rennes, Quimper…) est en train de se dérober sous les pieds de Flamby.
L’extrême gauche accroît sa pression sur le Gouvernement, servie en cela par les plans sociaux qui s’accumulent et par les révélations sans cesse réactualisées sur les turpitudes financières de la classe politico-médiatique qui dirige notre pays. Le chômeur de Florange n’apprend sans doute pas d’un cœur léger que l’emblématique directeur de Sciences Po, Richard Descoings, était payé 540 000 € par an, plus les frais, ou que le premier ministre Jean-Marc Ayrault est d’ores et déjà assuré d’une retraite mensuelle de 15 000 €, ou encore qu’Anne Hidalgo, première adjointe au maire de Paris cumule, à 53 ans, sa retraite de fonctionnaire avec ses indemnités d’élue, etc., etc.
Le Parti Socialiste, qui avait déjà couvert les galipettes de son candidat DSK, semble plus que jamais dominé par les trois concupiscences dénoncées par saint Jean : le sexe, l’argent et le pouvoir. Sa seule consolation étant que la droite parlementaire n’est guère plus édifiante, les deux anciens présidents de la République issus des rangs de celle-ci ayant, eux aussi, maille à partir avec la justice pour des questions financières.
« Quand les peuples cessent d’estimer, ils cessent d’obéir. »
Il n’est sans doute pas de meilleure illustration de cette affirmation de Rivarol que le « harcèlement démocratique » dont font l’objet, à l’occasion de chacun de leurs déplacements, les membres du Gouvernement et le président de la République lui-même, de la part des opposants à la dénaturation du mariage. Ces braves gens qui travaillent et paient leurs impôts, qui n’ont jamais manifesté, chahutent aujourd’hui les ministres, ce qui leur serait apparu totalement incongru il y a un an. On conçoit mal que cette situation puisse perdurer très longtemps, le pays apparaissant alors ingouvernable.
La République romaine distinguait l’auctoritas de la potestas. La première renvoyait à l’autorité morale des institutions et de leurs détenteurs, alors que la seconde concernait le pouvoir politique dans sa dimension contraignante et coercitive. Une autorité contraignante qui n’a plus le soutien d’une partie « consistante » de sa population s’appelle une dictature. Nous y sommes, même si cette dictature est formellement légale, ce qui était le cas de l’Allemagne nazie en 1933.
Le Gouvernement conserve cependant des soutiens : l’immense majorité de la classe médiatique, qui vit dans sa bulle totalement déconnectée du réel, les réseaux maçonniques, qui dépassent les distinctions droite-gauche comme le manifestent clairement les débats au Sénat sur « le mariage pour tous » et le soutien du frère Baroin – pourtant de l’UMP – à Jérôme Cahuzac au nom de la présomption d’innocence, une partie des organisations syndicales et l’appareil d’État, dont la police, qui manipule sans vergogne le nombre des manifestants des 13 janvier et 24 mars, alors que la gendarmerie se contente d’obéir aux ordres.
Le soutien populaire du Gouvernement est assuré majoritairement par les fonctionnaires, qui représentent globalement 25 % de la population active. Au-delà de la question des effectifs, que l’on omet souvent de mettre en corrélation avec les 35 heures et le temps de travail réel des fonctionnaires, ces derniers bénéficient de deux précieux privilèges : la sécurité de l’emploi et un mode de calcul des retraites particulièrement avantageux combiné à un âge moyen de départ à la retraite inférieur de quatre années à celui des salariés du privé.
Pour tenir les objectifs de déficit public fixés par Bruxelles, le Gouvernement a considérablement augmenté les impôts. Il s’attaque maintenant aux Allocations familiales, ce qui ne va pas calmer les manifestants anti mariage pour tous. Inéluctablement cependant, l’heure approche où, afin de réduire les déficits sociaux et budgétaires, il va falloir s’attaquer aux « privilégiés » qui coûtent chers à la collectivité nationale mais sont les ultimes soutiens du Gouvernement. Citons le régime d’assurance chômage des intermittents du spectacle (1/3 du déficit de l’assurance chômage consacré à 3% des cotisants), les régimes spéciaux de retraite, l’harmonisation du mode de calcul des retraites entre le public et le privé puisque, selon Jean-Marc Ayrault, « l’âme de la France c’est l’égalité ». À ma connaissance, il n’existe pas dans l’histoire de l’humanité de population privilégiée qui ait « librement » renoncé à ses privilèges, dont il convient de rappeler qu’ils n’ont rien, en eux-mêmes, d’illégitime s’ils correspondent effectivement à un service particulier rendu à la collectivité. Un privilège peut être justifié ; s’il ne l’est plus, il devient une injustice.
Ces fonctionnaires ou assimilés, en particulier les personnels de la SNCF et d’EDF, tiennent, aujourd’hui comme hier, le pouvoir politique à la gorge, car ils peuvent bloquer le pays. Toute remise en cause de leurs avantages, indispensable pour le rééquilibrage des comptes sociaux, débouchera sur des conflits autrement violents que les manifestations bon enfant des partisans du mariage entre un homme et une femme. Vincent Peillon a déjà réussi à indisposer les enseignants en imposant la réforme des rythmes scolaires et le retour à la semaine de 4,5 jours. Il est probable que ce n’est qu’un début, et que François Hollande, ayant annoncé une concertation sur la réforme, inéluctable, des retraites, va réussir cet exploit de parvenir à jeter dans la rue, contre lui, pour des raisons différentes, tous les Français. Avouons-le : ce n’est pas à la portée de tout le monde !
Vers le chaos ou vers la réforme institutionnelle ?
En fait de « ré-enchantement du rêve français », François Hollande nous mène benoîtement vers le chaos. Il est certain que s’il persiste dans son projet d’imposer « le mariage pour tous », l’opposition va se durcir et se politiser, malgré la volonté de Frigide Barjot et de l’UMP de ne surtout pas remettre en cause le système actuel. Les manœuvres pour remettre en selle les élus de l’UMP, qui, il y a 6 mois, à quelques exceptions près, auraient voté sans barguigner « le mariage pour tous », sont pathétiques à observer.
La IVe République s’effondra sur elle-même de ne pas avoir su résoudre la question algérienne. Il n’est pas impossible que la Ve implose sous les effets conjugués de la crise économique et financière, et maintenant sociétale et identitaire. Les princes qui nous gouvernent, coupés du peuple qu’ils méprisent depuis longtemps, ne comprennent pas ce qui se passe. Ils n’ont pas vu germer avant leur éclosion les bourgeons du printemps français et catholique qui ont été préservés de l’hiver matérialiste par des familles, des écoles, des paroisses… qui avaient pris au sérieux la parole de Jean-Paul II : « N’ayez pas peur ! » Ils ne comprennent rien à ce peuple qu’Élie Peillon, le fils de Vincent, voudrait pendre en place publique. Cette jeunesse motivée, ardente et disponible peut faire reculer un Gouvernement qui, sans doute, espère et craint à la fois « une bavure mortelle » qui liguerait contre lui les parents solidaires de leurs enfants, même si, bien sûr, tous les cadavres n’ont pas la même valeur aux yeux de la classe médiatique : tout le monde connaît Malik Oussekine et personne Sébastien Deyzieu.
Face à une classe politique totalement déconsidérée par sa corruption endémique et par son mépris du bien commun, uniquement soucieuse de conserver ses prébendes et ses privilèges, le salut ne pourra venir que d’une réforme en profondeur de nos institutions et un renouvellement quasiment complet de notre personnel dirigeant. Les institutions de la Ve République assurent une prédominance totale de la potestas sur l’auctoritas. Le couvercle est soigneusement fixé sur la cocotte minute qui continue de bouillir. Plus le temps passe, plus l’explosion, inévitable car les différentes crises poussent leurs feux sous la marmite, sera violente !
Jean-Pierre Maugendre